#Live : Ellende + Groza + Servant @ The Black Lab, Wasquehal – 08/10/2024

L’arrivée de l’automne est synonyme de dépression saisonnière, et The Black Lab ainsi que Garmonbozia ont choisi de ne pas nous laisser de répit. Le 8 octobre, nous nous apprêtions donc à laisser notre joie de vivre au placard pour se plonger corps et âme dans une soirée belle et sombre. Les allemands de Servant et Groza sont prêts à répandre toute leur noirceur, avant une fin en apothéose avec les autrichiens de Ellende, pour une soirée 100% AOP Records. 

Article par Mégane

Photos par Marye DAVENNE

English version below


Après une intro qui nous met tout de suite dans l’ambiance, Servant monte sur scène. Les quatres protagonistes sont grimés et Farago (guitare/chant), en maître de cérémonie, est capuchonné. A la manière d’un évangile, il nous fait régulièrement signe de croix avec son index et son majeur. Les allemands ont sorti leur dernier album, Death Devil Magic, très récemment. L’ouverture du concert se fait d’ailleurs sur “Temple”, issu de ce dernier opus. Les riffs de guitare mélodiques nous envoûtent tandis que la base rythmique sombre et lourde nous maintient très ancrés. Le contraste entre les passages posés et ambiants et ceux qui se veulent explosifs rythment le show du groupe. Les reflets orangés sur les cymbales de Apophis sont comme des braises incandescentes venues du plus profond des enfers. Cette impression est renforcée par les blasts puissants qui émanent de la grosse caisse. Le groupe joue avec le public, l’haranguant régulièrement, le faisant participer par des poings levés, des cris d’approbation… Côté public, on se prête très facilement au jeu. On est loin d’être serré dans la salle, qui n’est toutefois clairement pas vide. Il faut dire que la tournée passe par Paris le lendemain, dans une salle équivalente, ce qui est plutôt rare, le public étant plus nombreux dans la capitale. La deuxième partie du set se fait dans une ambiance plutôt vert / bleu qui nous évoque davantage une ambiance de fond marin ou terrestre. Les samples accompagnent les titres et les transitions, les soutenant sans jamais être envahissants. Les titres sont piochés dans toute la discographie du groupe, nous offrant une image complète de ce qu’ils sont capables de produire. Après une grosse demi-heure, Servant quitte la scène sans oublier d’immortaliser ce moment par une traditionnelle photographie. 

Servant @ The Black Lab, Wasquehal – 08/10/2024

On s’apprête à retrouver Groza et leur black metal très stylisé sur scène. L’arbre, emblème du groupe, est bien présent. Les musiciens arrivent avec leurs traditionnelles capuches, le visage recouvert par une espèce de voile qui les fait devenir des instruments au service de leur musique, impersonnels. Avec Nadir, leur dernier album sorti fin septembre, on avait déjà perçu le potentiel émotionnel de ce concert. Les allemands ne trahissent pas ce pressentiment, et dès les premières notes, on est embarqué dans ce tsunami émotionnel. La musique nous prend aux tripes comme on a rarement ressenti. La voix posée sur les mélodies et les blasts nous envoie une explosion de douleur et de cris, et nous souffle totalement. On vit le moment intensément, en communion avec le groupe. La salle est d’un silence de mort, presque solennel, chacun étant dans une introspection totale. On se recentre, on vit des émotions aussi fortes que celles de la vie dehors. Les parties de guitare seule sont absolument magnifiques et arrivent à exprimer des choses qu’aucun mot ne pourrait faire. Certains titres nous embarquent encore plus loin que tout ce que l’on pensait possible, repoussant les limites de notre capacité émotionnelle. Le fond de la salle est vide, mais les rangs sont resserrés pour profiter au mieux de l’aspect d’intimité que procure le groupe. Chaque note vibre et résonne en nous, formant un tourbillon émotionnel qui emplie tout notre être. Le son impeccable nous permet de vivre de manière optimale ce concert des plus incroyables. Le batteur finit debout sur son siège, et Groza quitte la scène sur un final tout aussi grandiose que le reste du concert. On reste scotché, au bord des larmes, débordés par des émotions intenses bien après que le groupe soit parti. On avait beau s’y attendre, cette intensité est bouleversante et fait partie de ces moments suspendus dont nous nous souviendrons très longtemps. 

Groza @ The Black Lab, Wasquehal – 08/10/2024

On doit vous avouer qu’à ce stade de la soirée, on ne sait pas si on pourra émotionnellement encaisser ce qui nous attend. Car on a pas mal écouté Ellende, et notamment leur dernier album, Todbringerin, sorti fin août, et on sait à quel point leur black metal ambiant ne nous laissera pas indifférent. L’introduction en mode piano samplée nous annonce déjà la couleur. Et en à peine quelques secondes, on est à nouveau embarqué dans ce nouveau concert, vivant pleinement l’instant et oubliant qu’on avait dépassé nos limites émotionnelles seulement quelques minutes auparavant. La voix de L.G est plus en retrait, ayant un aspect guttural et presque ancestral. Le maquillage des musiciens nous plonge dans leur univers. L.G est couvert d’ossements, rappelés également sur les backdrops. L’ambiance particulièrement mélodique nous enveloppe, tandis que l’aspect brut de la voix nous renvoie à des sensations archaïques, qui nous amènent dans des ressentis corporels davantage que dans quelque chose de conscientisé. On est là encore dans le registre magistral. Le groupe a la particularité de ne pas comporter de basse, ce qui renforce cet aspect mélodique et hors du temps. Les parties instrumentales nous bouleversent et L.G nous donne des frissons lorsqu’il finit par y poser sa voix. Ellende ne nous laisse aucun répit, et L.G sort la guitare acoustique qui fait évoluer encore cet univers. C’est d’ailleurs ce qui ressort comme ressenti du set : un concert évolutif, qui amène de plus en plus de puissance dans l’émotion dégagée. C’est un peu comme si quelqu’un avait éteint toutes les lueurs de bonheurs en nous, tandis que toute cette noirceur est d’une beauté incroyable, nous renvoyant à l’essence même de nos existences. On termine cette soirée tardivement, mais on ne sait même pas vraiment se repérer dans le temps, chamboulés par ces lives incroyables. 

On repart complètement bouleversés par cette soirée. On n’aurait pas pu rêver meilleur line up. En écrivant ces lignes, plusieurs jours après, je vous assure ressentir encore toutes ces émotions qui nous ont assaillies, avec bonheur, frisson et mélancolie profonde. On vous conseille vivement d’aller écouter les sorties récentes de ces trois groupes, que l’on ne manquera pas de retrouver sur scène dès que possible. 

Ellende @ The Black Lab, Wasquehal – 08/10/2024

Dans ce report, nous avons beaucoup abordé les affects dépressifs. La dépression est une maladie. Il existe des associations, des numéros anonymes… Faites vous aider et surtout ne restez pas seuls.

Un grand merci à Mic pour les accréditations, et au Black Lab pour leur accueil.


The arrival of autumn is synonymous with seasonal depression, and The Black Lab and Garmonbozia have chosen not to let us rest. So, on October 8, we were ready to leave our joie de vivre behind and plunge body and soul into a beautiful, dark evening. Germany’s Servant and Groza are ready to spread their darkness, before an apotheosis ending with Austria’s Ellende for an evening 100% AOP Records.

Review by Mégane

Pictures by Marye DAVENNE

After an intro that immediately sets the mood, Servant take to the stage. The four protagonists are dressed in masks and Farago (guitar/vocals), as master of ceremonies, is hooded. In gospel style, he regularly makes the sign of the cross with his index and middle fingers. The Germans recently released their latest album, Death Devil Magic. The concert opens with “Temple”, from this latest opus. The melodic guitar riffs have us spellbound, while the dark, heavy rhythmic base keeps us firmly anchored. The contrast between the calm, ambient passages and the explosive ones gives rhythm to the band’s show. The orange glints on Apophis’ cymbals are like glowing embers from the depths of the underworld. This impression is reinforced by the powerful blasts emanating from the bass drum. The band play with the audience, regularly haranguing them, involving them with raised fists, shouts of approval… As for the audience, they lend themselves very easily to the game. The room is far from crowded, but clearly not empty. It’s worth noting that the tour passes through Paris the following day, in an equivalent venue, which is rather rare, as the audience is larger in the capital. The second half of the set takes place in a rather green/blue atmosphere, more reminiscent of a sea or land background. Samples accompany the tracks and transitions, supporting them without ever becoming intrusive. The tracks are drawn from the band’s entire discography, giving us a complete picture of what they’re capable of producing. After a hefty half-hour, Servant leave the stage, without forgetting to immortalize the moment with a traditional photograph.

We’re about to welcome Groza and their highly stylized black metal back to the stage. The tree, the band’s emblem, is very much in evidence. The musicians arrive in their traditional hoods, their faces covered by a kind of veil that turns them into impersonal instruments at the service of their music. With Nadir, their latest album released at the end of September, we had already sensed the emotional potential of this concert. The Germans don’t betray this premonition, and from the very first notes, we’re swept up in this emotional tsunami. The music takes us by storm in a way we’ve rarely felt before. The vocals layered over the melodies and blasts send us into an explosion of pain and screams, blowing us away. We live the moment intensely, in communion with the band. The room is deathly silent, almost solemn, everyone in total introspection. We refocus, experiencing emotions as strong as those of life outside. The guitar parts alone are absolutely magnificent, expressing things that no words could. Some tracks take us further than we ever thought possible, pushing the limits of our emotional capacity. The back of the room is empty, but the rows are tightly packed to make the most of the intimacy the band provides. Every note vibrates and resonates within us, forming an emotional vortex that fills our whole being. The impeccable sound allows us to experience this most incredible concert to the full. The drummer ends up standing on his seat, and Groza leaves the stage on a finale just as grandiose as the rest of the concert. We remain glued, on the verge of tears, overwhelmed by intense emotions long after the band has left. Although we’d expected it, the intensity is overwhelming, and one of those suspended moments we’ll remember for a very long time.

We have to confess that, at this stage of the evening, we don’t know if we’ll be able to emotionally handle what awaits us. We’ve listened to a lot of Ellende, especially their latest album, Todbringerin, released at the end of August, and we know that their ambient black metal won’t leave us indifferent. The sampled piano intro already sets the tone. And in just a few seconds, we’re back on board, living the moment to the full, forgetting that we’d exceeded our emotional limits just a few minutes earlier. L.G.’s voice is more subdued, with a guttural, almost ancestral quality. The musicians’ make-up immerses us in their universe. L.G. is covered in bones, also recalled on the backdrops. The particularly melodic ambience envelops us, while the raw aspect of the vocals takes us back to archaic sensations, leading us to bodily feelings rather than anything conscious. Here again, we’re in the magisterial register. The band’s distinctive absence of bass reinforces this melodic, timeless aspect. The instrumental parts overwhelm us, and L.G. gives us the shivers when he finally lays down his voice. Ellende gives us no respite, and L.G. brings out the acoustic guitar to further develop this universe. In fact, that’s what you get from the set: an evolving concert, bringing more and more power to the emotion released. It’s as if someone has extinguished all the glimmers of happiness within us, while all this darkness is incredibly beautiful, sending us back to the very essence of our existence. We finish the evening late, but we can’t even really find our bearings in time, turned upside down by these incredible live performances.

We left completely overwhelmed by the evening. We couldn’t have asked for a better line-up. As I write these lines, several days later, I can assure you that I’m still feeling all the emotions that assailed us, with happiness, thrills and deep melancholy. We strongly advise you to go and listen to the recent releases by these three bands, who we’ll be sure to see live again as soon as possible.

In this report, we’ve talked a lot about depressive affects. Depression is an illness. There are associations, anonymous numbers… Get help, and above all, don’t be alone

 

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