A l’occasion de la sortie de leur tout premier album, The Purest Light, l’équipe de Sounding Shivers a eu l’opportunité d’interviewer Vertex, autour d’une bonne bière aux 3 Brasseurs Bistro Pub. Tout le groupe était présent, (enfin presque) pour y parler composition de musique, art, conviction, réécriture de morceaux.
Interview par Marye DAVENNE et Victor BRUNERIE
Marye : On va commencer peut-être par parler de la formation. Depuis votre premier EP, vous avez eu un changement de line-up
Pierre (batterie) : Il y a eu pas mal de changement effectivement.
Max (guitare) : Depuis le début, on est là avec Pierre. On a eu 2 chanteurs et 3 bassistes. Aujourd’hui, on est en compagnie de Sylvain, le deuxième bassiste du groupe, qui remplace le troisième, absent ce jour
Pierre : On a eu un premier bassiste qui a disparu dans la nature, puis Sylvain, ici présent qui a pris la relève, pour un court passage, et enfin un troisième bassiste, Mike, qui est absent aujourd’hui, mais remplacé par Sylvain. Mais sur l’album, c’est bien Mike. Ensuite on a Kik, notre deuxième chanteur.
Kik (chant) : Ça fait quand même plusieurs années que je suis là, je suis arrivé à l’été 2019, après la sortie de l’EP.
Marye : La première approche que l’on a avec votre album, c’est cette pochette assez intrigante. Une photo d’une sculpture, c’est assez rare de voir ça.
Kik : Oui, c’est une sculpture de Farzaneh Hosseini, une plasticienne iranienne de Téhéran extrêmement talentueuse. Elle expose un peu partout dans le monde. On peut facilement comprendre qu’au vue de sa nationalité, il peut y avoir quelques barrières pour elle, mais elle vit de son art.
Marye : C’est elle qui a fait les sculptures à la fois sur la pochette de l’album, mais aussi de vos singles…
Pierre : On a décliné tout son travail, qu’on a fait coïncider. Cyril Balthazar, le boss du Cri Du Charbon, notre label, a travaillé l’infographie pour mélanger les esquisses de dessins que Farzaneh a fait, avec ses sculptures.
Max : Sur les trois singles, on a bien un mélange des graphismes qui aident les dessins autour des sculptures. Sur la pochette de l’album, on a laissé que la sculpture.
Marye : C’étaient des œuvres qui existaient déjà ?
Kik : Bien sûr, elles n’ont pas été faite pour nous. On a sélectionné celle qui nous parlaient le plus, et correspondaient le plus à ce qu’on voulait dire. C’est une façon imaginée de présenter nos morceaux. Il y a eu un consensus très rapide parmi nous, alors que ce n’est pas le plus simple dans la vie des groupes d’être d’accord d’habitude, surtout quand ça ne touche pas à la musique. Je leur ai présenté ça, en leur disant « Voilà, y’a mon amie Farzaneh qui fait ça, je trouve ça extraordinaire, et y’a un vrai sens derrière tout ça, militant sur sa pratique à elle » et tout le monde à flasher. Parfois le beau est universel tout simplement.
Max : C’est vrai que si on avait voulu engager un artiste sur le design de l’album, je pense que ca aurait été assez proche de ce qu’elle a fait. Ca s’est hyper bien goupiller.
Pierre : Ouais on a eu vraiment beaucoup de chance, car les visuels de disques, ça peut vite être l’enfer.
Marye : Surtout à l’aire des IA
Kik : C’est hors de question d’utiliser ces outils, me concernant.
Max : On voulait de toute façon quelque chose d’artisanal, touché avec les mains.
Kik : Avec les mains oui… C’est comme ça qu’on fait de la musique, comment on l’aborde, comment on la joue, comment on la pense, et comment on la vit. On fait de la musique organique, donc on voulait de l’organique, qui sortent des mains de quelqu’un, qui travaille la matière, pas se servir d’algorithme à la con.
Victor : Sur votre album, on a un morceau qui s’appelle « Leviathan », est ce que c’est une envie de faire un lien avec la mythologie ?
Kik : Oui et non. Les textes ont été écrit par moi, je suis impregné de cette culture mythologie. Mais pour le coup, ce morceau est plutôt une métaphore pour parler de ce qui s’est passé au printemps 2020, une métaphore de la toute puissance étatique, sur comment on a vécu la pandémie. Les choses mises en place par l’état, injustifié et incensé. Je ne sais pas comment chacun a vécu cette période, mais moi j’étais à la campagne. Donc comparé la situation entre le 20eme arrondissement de Paris et un village perdu de 300 habitants, ce n’est pas possible.
Victor : Sur cet album, vous avez fait l’exercice de ré-écrire certains de vos morceaux de votre EP Scalable. Comment s’est passé le travail, toi Kik en tant que nouveau chanteur, de rebosser sur des paroles qui ne sont pas les tiennes ?
Kik : J’ai pris ce qu’à fait l’autre chanteur, je ne le connais pas du tout, je ne l’ai jamais rencontré. Je ne me suis pas du tout retrouvé dans ce qu’il proposait donc j’ai demandé à Max et Pierre si je pouvait tout re-écrire. Intégralement. Ils ont accepté, en me demandant parfois de garder un refrain, ou un placement sur une partie. On a avancé comme ça au début. J’ai bossé les morceaux, je leur ai fait des propositions, c’était intéressant, c’était au tout début, quand on s’aimait bien encore [rire]. On a pas mal retouché et pour Scalable par exemple, le refrain est gardé tel quel. En général, j’ai gardé les titres des morceaux, j’ai survolé une fois les textes de l’ancien chanteur et je les ai enlevés de ma tête.
Pierre : Après la sémantique des textes de Philippe, ça te parlait quand même un peu.
Kik : Oui, l’univers m’a plu. Je me souviens de la première écoute, ça remonte maintenant, mais à l’époque j’avais compris les approches distopyques, futuristes, de ce qui peut se passer sur des thèmes qui me correspondent tout à fait. Et aussi le nom du groupe ramenait vachement ça je trouvais. J’ai gardé ça et je me suis totalement retrouvé.
Marye : Et vous, en tant que musiciens, retravailler sur des pistes que vous avez déjà fait auparavant, l’exercice est compliqué ?
Max : Pour moi ça a été.
Pierre : Moi ça a été assez laborieux. L’idée qu’on avait, c’est que sur l’album, on a quand même trois morceaux de Scalable qu’on a repris car c’est des morceaux qu’on aime profondément. On voulait qu’ils soient sur l’album, avec la production de l’album. On s’était demandé si on reprenait juste les pistes et on refaisait le mix, ou est-ce qu’on part sur le re-enregistrement total, en retravaillant certaines choses. En tant que batteur, au début j’étais en mode « roh ces morceaux, je les ai déjà enregistré, j’ai déjà vécu l’expérience studio de ces morceaux. Ca a été par moment un petit peu compliqué. Il y avait clairement moins de fraicheur à les faire. On a tout re-enregistré, ce qui était une très bonne décision avec le recul, permettant une vraie cohérence sonore sur l’album. A titre personnel, j’aime bien sur-exploité un morceau, qu’il ait une vraie valeur profonde, artistique. J’aime beaucoup le faire évoluer, le re-façonner. Habituellement, c’est ce que le live permet de faire, mais les artistes ne le font pas tellement. Certains groupes ne retravaillent pas du tout leurs morceaux.
Kik : C’est dû aussi à comment les lives sont abordés. Nous on joue sans métronome, il n’y a pas de synthés, il n’y a rien.
Max : On a des amplis.
Sylvain (basse) : Oui, il y a beaucoup de concerts de métal sans ampli.
Kik : Par exemple, j’ai vu dernièrement le groupe dont tu as le pull [Marye portait un pull Rise of The Northstar, ndlr], ils n’abusaient pas, ils ont pas mal de séquence balancée. Je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire, mais ils se mettent dans un carcan qui est métronomique. Ça commence là, ça finit là. Ça prends une dimension spectaculaire, ce qui n’est pas du tout ce que j’ai envie de faire.
Pierre : Pas au sens mise en scène
Kik : Au sens spectacle calibré à la seconde, c’est bien ça permets d’avoir des shows light. Ce n’est pas le choix ultime, on a nos raisons de faire comme ça. On tient à l’organique, au vivant. Il se passe des choses etc.. Il y a une cohérence d’ensemble là-dedans.
Max : C’est un parti pris assez fort de jouer sans métronome, sans bande. Là où même beaucoup d’artistes qui ne sont pas métal les ont. Quand on a joué à l’Euroblast, on a été surpris que la totalité des artistes n’avaient pas de son plateau, ils avaient que la batterie sur le plateau, sans ampli. Ça c’est pas du tout la manière dont on a nous a l’habitude de faire de la musique et de la donner aux gens.
Kik : Chacun fait bien comme il veut, mais sur le live, quand c’est trop calibré. Tu vois un show de la tournée, si tu vas sur une autre date, il va se passer exactement la même chose.
Max : C’est un peu une manière plus artisanale, rodéo de faire de la musique. Il y a un côté sans filet et organique dans la manière de jouer.
Victor : Puis ça permet peut-être de changer votre set tout au long de la tournée
Kik : Y’a ça, ça permet aussi de faire des tests, faire 4 points de plus, 4 points de moins. On a tous des plages d’improvisations prévues dans les morceaux. Alors sur l’album c’est calibré, mais en live, c’est ouvert. Donc en live, on est obligé de se regarder.
Sylvain : Il y a quand même un truc assez fou, c’est qu’on a grandit avec des références qui sont avant les années internet, avant les années 2000. Toute la scène Djent ou prog post 2000, où on a senti le changement dans la manière de concevoir le live. On a grandi avec des amplis, y’a un truc ultra punk là derrière. Y’a de la matière.
Kik : C’est un peu ce qui s’est passé cet après-midi, on était le seul groupe avec des amplis. [Vertex étaient en enregistrement au Black Lab des live sessions des triomphes du métal français, en compagnie de Two Trains Left et Hurakan, ndlr].
Sylvain : On a nos références, et notre manière d’appréhender les choses. Il y a un truc où ça bouge, dans les trucs qu’on écoute. Je pense au thrash des années 80, toute cette période-là. C’est des groupes qui ont appris ensemble, avec des tempos par partie. Quand t’écoute Slayer, Napalm Death, ça bouge !
Pierre : Slipknot fait ça aussi !
Sylvain : Ouais Slipknot sur les premiers albums font ça aussi.
Kik : Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, je trouve que ça aseptise vachement. On perd ce qu’est le rock’n’roll.
Pierre : Après y’a des choix qui sont fait. Je pense à Messhugah, sur un très gros parti pris esthétique.
Sylvain : Oui, ils sont précurseurs, et ça groove. C’est de la musique de trans.
Kik : Oui, on ne dit pas que ce n’est pas bien, c’est juste une autre approche de la musique, qui maintenant est déployé partout. Tout le monde fait ça maintenant. Quand tu vois certains groupes, tu te prends des murs de guitares, alors que tu as deux guitaristes. Mais t’a six grattes studios balancé par-dessus, elles sont sous mixés, d’accord, mais tout est au millimètre. Moi, ça me fait bizarre quand t’as un chanteur qui enlève son micro et t’entends son refrain chanté qui arrive derrière. Là, mec, moi ça me fait bizarre.
Max : Dans le plaisir de jouer comme ça, moi ça me permet d’avoir une énergie exutoire. Qu’il y ait énormément de volume, que ça soit une vraie décharge en termes de plaisir. Ça peut paraitre pour certains moins professionnel de jouer comme ça, mais toute cette énergie-là, le public le reçoit.
Pierre : Oui, à chaque fois qu’on joue, on en fait l’expérience. Les gens sont presque émus, ils chevauchent la musique avec toi.
Kik : Bah et si tu te plantes en plein milieu, bah tu rigoles. Tu regardes ton pote et tu te marres quoi. Même si tu fais un four, c’est de la musique vivante ! Tu pètes une corde, y’a plus de son de guitare quoi.
Max : Dans la démarche, c’est moins grave de faire une erreur. Faut pas dramatiser le fait de se tromper. Dans la scène métal, y’a un truc de la performance attendue qui est assez haute, on se mets beaucoup de pression. Faut savoir dédramatiser ce truc-là, et de le faire de manière rock’n’roll.
Pierre : Dans la scène djent, les salles sont remplies de sniper prêt à bondir dès qu’il y a une note de traviole. Déjà t’as envie de dire, avant de sniper, vient bosser l’instrument, et puis, faut accepter que ça arrive de se vautrer.
Sylvain : Ça aussi, les gens ils le sentent si tu réagis en mode « c’est pas grave ».
Victor : C’est exactement ce qui s’est passé lors du concert de Plini au Motocultor, y’avait une vraie envie d’être là, ça jouait du prog sans être millimétré. Ils ont invité le public à s’asseoir, profiter. Peut importe ce qu’il se passait, ça jouait, sans prise de tête.
Marye : On parle de plein de genres musicaux, comme ce qui peuple votre album. Vous avez les étiquettes prog et deathcore. Je trouve qu’il y a énormément de rythmiques très industrielles cachées derrière, mais ce qui ressort de tout, c’est la technicité, sans jamais être pompeux, alors que ça peut vite l’être. Ça s’entends depuis le début de l’interview, vous êtes des vrais musiciens qui aiment la musique. Est-ce qu’il y a une volonté de mettre cette technique bien en avant.
Max : Je pense que le propos principal est d’exprimer quelque chose d’explosif, donner une émotion à travers ce truc-là. Ce n’est pas de la technique pour la technique. C’est aussi un côté fou, lâcher les chevaux jusqu’au bout. Ça rejoint tout ce qu’on dit de faire de la musique sans métronome. Ça nous fait plaisir de faire la musique comme ça.
Kik : Pierre a un peu carte blanche à la batterie, je pense que c’est ce que tu ressens.
Pierre : Pour moi, c’est un peu un labo aussi. Quand j’écris des morceaux pour Vertex, ce sont des trucs que j’expérimente, c’est un vrai moyen d’expression. Je suis un peu un nerd de mon instrument, je cherche toujours à savoir ce que je vais pouvoir faire avec ça. Avec toujours en tête l’idée qu’il faut que ça zouke. Il faut pouvoir un peu danser, faut qu’il se passe un truc, sinon ça m’emmerde. Parfois c’est trop alambiqué, y’a des moments, la pulse, les auditeurs ils ne vont pas savoir qu’il se passe tel ou tel truc musicalement, ce n’est pas très grave.
Kik : Moi ce que je ressens en concert, c’est que ça bouge la tête et ça pogote. Même sur des trucs hyper techniques, ça bouge, ça se rentre dedans. En tout cas, c’est cool que t’aie entendu ça dans notre musique.
Sylvain : Il y a un truc méga vivant. Je n’ai pas enregistré l’album, mais je connaissais une partie des morceaux. J’avais la mort de ne pas les avoir enregistrés car quand je les ai entendus, je me suis dis « Oh putain ca déboite ». Mais c’est juste que je connais certains morceaux, je les ai joués, et si je les écoute, vraiment en tant qu’auditeur, bah je me dis « En fait, y’a pas beaucoup de groupes qui ont l’audace de présenter un truc acoustique » car là on est vraiment sur un truc acoustique, dans le sens il n’y a pas de sample. L’émotion, on la sent grâce à la dynamique.
Pierre : C’est vrai que moi, j’ai un jeu très dynamique. On va mentionner Thibault Bernard du studio Convulsound, qui a mixé ce disque, qui a super bien respecté ça. Il a mixé ça comme un bœuf, il n’y va pas avec le dos de la cuillère, et il fait ça trop trop bien. Là c’est super parcequ’il a vraiment respecté ce truc-là, la notion de dynamique. C’est hyper important en musique. Maintenant, on te livre des blocs, des masters.. C’est des mastodontes. Là il y a un truc très acoustique comme disait Sylvain, sur le son de batterie. Thibaut qui a mixé, il a peté les câbles parce que le nombre de groupes qu’il reçoit, où on lui envoie des tracks midi. Où les gars ont fait ça avec un logiciel. C’est très chouette qu’il a respecté ça. Il y a un truc dont tu as parlé, tu as parlé d’Indus.
Kik : Ouais c’est vrai, c’était bien quand t’as dit ça. Vous êtes bien vous comme journaliste [rire]
Pierre : L’Indus, j’adore ça, personnellement. Dans l’album, on n’a pas de synthé, pas de clavier, enfin si un tout petit peu. On a fait un petit arrangement discret, mais pour le coup, dans l’indus t’as du trig, du sample, donc ce n’est pas un truc dont je fais le rejet. Mais la volonté de Vertex, c’est pas du tout ça, l’idée c’est : la pièce. Parfois j’ai envie de faire un concert où j’ai les amplis, et les gens seraient avec nous au milieu. On jouerait au milieu des gens, ça me plait beaucoup.
Marye : Vous les avez mentionnés au tout début, votre label pour cet album est Le Cri Du Charbon. Comment s’est passé le travail avec eux ?
Pierre : Cyril Balthazar, c’est un ami depuis une dizaine d’année, j’ai travaillé avec lui avec le groupe Bottle Next et on s’est rencontré à cet occasion. Le Cri Du Charbon, c’est un label indépendant stéphanois. C’était particulier parce qu’on est arrivé, on avait ce disque, on a été toquer à des portes comme Nuclear Blast.. Mais de nos jours, les labels ne font plus trop de développement comme ça. C’est très compliqué d’arriver avec une musique de niche comme ça. Et Cyril, qui ne faisait pas du tout du métal, mais qui a un certain affect avec cette musique, a pris le risque. Je trouve ça trop chouette qu’on se retrouve avec un disque musicalement et au niveau de la démarche, sur le plan du label, on est complètement hors des clous de ce qu’il fait aujourd’hui. C’est pas du tout un label métal, mais c’est un vrai gars qui produit le disque. Quand on est arrivé, on avait déjà le master du disque terminé mais la plupart des labels, ils signent mais ils ne produisent pas vraiment un disque. L’artiste finance tout, il fait une avance et le label revends le merch, la fab à l’artiste. Ce sont des démarches un peu douteuses. Alors tous les labels ne font pas ça, mais j’ai un vécu de label comme ça. Cyril, il a un vrai soutien, et une vraie pensée de la musique alternative. Mine de rien, je pense qu’avec Spotify, ça pue la merde grave pour les artistes. On est sur une économie très compliqué et qui va devenir désastreuse pour les artistes. Même les gros artistes comme Madonna, ils vont se faire baiser la gueule à un moment. Ce truc de serpent qui se mords la queue. Si ça continue dans ce sens-là, les énormes artistes vont se retrouver niquer. Ça ne peut pas durer comme ça. Je trouve qu’il y a plein de gens qui pouvaient travailler avec nous. Mais on est allé chez Cyril et le Cri Du Charbon, car il produit. Pour lui, c’est un jeu aussi de se dire « Allez je vais produire du métal extrême de niche ». Il prend un risque mais grâce à lui on a une distribution avec Inouïe Distribution. Moi ça me plait, je suis content de faire ça, avec ces gens-là. C’est un peu en marge du système qui est instauré en ce moment. Pour moi, ça a du sens, qui va permettre au groupe de durer. Si le groupe se casse la gueule, ça ne sera jamais à cause du label ou de la distribution car je trouve qu’on a fait un truc humain. On n’est pas à la recherche de stream sur Spotify, bien que la plupart des gens ont ce discours-là. J’invite tout le monde à regarder la série « Played » sur Netflix, qui parle de Spotify. Même si je dis d’aller voir un diable pour connaitre un peu plus un autre. Vous vous rendrez compte des ordures qui tiennent entre leurs mains l’industrie musicale. La démarche est épouvantable. C’est révoltant. Alors oui, on est sur Spotify parce que c’est le monde musical aujourd’hui, mais faut être attentif à ce qu’il se passe. Moi j’aimerai bien que ca se fasse autrement.
Marye : On est un peu à court de temps, donc on va clôturer cette interview alors notre question habituelle. Sur Sounding Shivers, on est à la recherche de tous ces groupes qui nous donnent des frissons, ces fameuses « Shivers ». Est-ce que vous, vous avez des artistes français actuels qui vous donnent ces frissons ?
Max : J’écoute un artiste Lyonnais qui s’appelle Ugo Del Rosso, il me fout les poils à chaque fois que je l’écoute. C’est de la pop, principalement guitare voix. Il se produit aussi en groupe, il a sorti un album en début d’année 2024, c’est une musique absolument incroyable. Il n’est pas super connu, mais c’est absolument génial.
Pierre : Les frissons, ce n’est peut-être pas le bon mot, mais moi je voulais parler de Horshk, un groupe d’Indus que j’aime vraiment bien ce qu’ils font. La scène indus en France n’est pas hyper développer. Je ne suis pas très fan de Carpenter Brut ou Perturbator, mais Horshk ça me parle carrément plus.
Marye : Un grand merci pour ce super moment d’échange.
Un grand merci à Clément de Vous Connaissez ? pour l’opportunité, au 3 Brasseurs de Villeneuve d’Ascq pour leur accueil, et enfin à Vertex pour cet heure d’interview extrêmement sympathique.
To celebrate the release of their debut album, The Purest Light, the Sounding Shivers team had the opportunity to interview Vertex over a good beer at Les 3 Brasseurs Bistro Pub. The whole band was on hand (well, almost) to talk music composition, art, conviction and song rewriting.
Interview by Marye DAVENNE and Victor BRUNERIE
Marye: Let’s start by talking about your formation. Since your first EP, you’ve had a change of line-up.
Pierre (drums): There have indeed been quite a few changes.
Max (guitar): Since the beginning, we’ve been here with Pierre. We’ve had 2 singers and 3 bassists. Today, we’re joined by Sylvain, the band’s second bassist, who’s replacing the third, who’s absent today.
Pierre: We had a first bass player who disappeared into thin air, then Sylvain here took over for a short spell, and finally a third bass player, Mike, who is absent today, but replaced by Sylvain. But on the album, it’s Mike. Then there’s Kik, our second singer.
Kik (vocals): I’ve been with the band for several years, having joined in the summer of 2019, after the release of the EP.
Marye: The first thing we have when we’re introduce to your album is the intriguing cover. It’s quite rare to see a photo of a sculpture.
Kik: Yes, it’s a sculpture by Farzaneh Hosseini, an extremely talented Iranian artist from Teheran. She exhibits all over the world. It’s easy to understand that, given her nationality, there might be a few barriers for her, but she makes a living from her art.
Marye: It was she who did the sculptures on both the album cover and your singles…
Pierre: We took all her work and made it coincide. Cyril Balthazar, the boss of Cri Du Charbon, our label, worked on the computer graphics to blend the sketches Farzaneh had made with his sculptures.
Max: On the three singles, we have a mix of graphics that help the drawings around the sculptures. On the album cover, we only left the sculpture.
Marye: These were works that already existed?
Kik: Of course, they weren’t made for us. We selected the ones that spoke to us the most, and corresponded the most to what we wanted to say. It’s an imaginative way of presenting our songs. There was a very quick consensus among us, whereas it’s not usually the easiest thing in band life to agree, especially when it’s not about the music. I presented it to them, saying “Well, there’s my friend Farzaneh who’s doing this, I think it’s extraordinary, and there’s a real meaning behind it, militant about her own practice”, and everyone clicked. Sometimes beauty is simply universal.
Max: It’s true that if we’d wanted to hire an artist to design the album, I think it would have been pretty close to what she did. It worked out really well.
Pierre: Yeah, we were really lucky, because record visuals can quickly become a nightmare.
Marye: Especially in the age of AIs.
Kik: It’s out of the question for me to use these tools.
Max: Anyway, we wanted something handmade, touched with our hands.
Kik: With the hands, yes… That’s how we make music, how we approach it, how we play it, how we think about it, and how we live it. We make organic music, so we wanted something that came out of someone’s hands, that worked with the material, not some stupid algorithm.
Victor: On your album, there’s a track called “Leviathan”. Is this a desire to make a link with mythology?
Kik: Yes and no. The lyrics were written by me, I’m steeped in mythological culture. But for the time being, this track is more of a metaphor for what happened in the spring of 2020, a metaphor for the omnipotence of the state and how we lived through the pandemic. The things put in place by the state, unjustified and insane. I don’t know how everyone lived through this period, but I was in the countryside. So to compare the situation between the 20th arrondissement of Paris and a remote village of 300 inhabitants, it’s just not possible.
Victor: On this album, you rewrote some of the tracks from your Scalable EP. What was it like for you, Kik, as the new singer, to work on lyrics that weren’t your own?
Kik : I took what the other singer had done, I don’t know him at all, I’ve never met him. I didn’t feel at all at home with what he was proposing, so I asked Max and Pierre if I could rewrite the whole thing. The whole thing. They agreed, sometimes asking me to keep a chorus, or a placement on a part. That’s how we got started. I worked on the songs, I made suggestions, it was interesting, it was at the very beginning, when we still liked each other [laughs]. We did a lot of reworking, and for « Scalable », for example, the chorus is kept as it is. Generally speaking, I’ve kept the titles of the songs, but I’ve skimmed over the lyrics of the former singer once and removed them from my head.
Pierre: After that, the semantics of Philippe’s lyrics spoke to you a little.
Kik: Yes, I liked the universe. I remember the first time I listened to it, it was a long time ago, but at the time I understood the distopian, futuristic approach to what could be happening on themes that corresponded perfectly to me. And the band’s name really brought it home to me. That’s what I kept, and that’s how I found myself.
Marye: And for you, as musicians, reworking tracks you’ve already done before is a complicated exercise?
Max: It was okay for me.
Pierre: For me, it was quite laborious. The idea we had was that on the album, we had three tracks from Scalable that we covered because they’re songs we really like. We wanted them to be on the album, with the album’s production. We wondered whether we’d just rework the tracks and redo the mix, or go for a total re-recording, reworking certain things. As a drummer, at first I was in “roh these tracks, I’ve already recorded them, I’ve already lived the studio experience of these tracks. It was a bit complicated at times. There was clearly less freshness in doing them. We re-recorded everything, which was a very good decision in retrospect, as it gave the album a real coherent sound. On a personal level, I like to over-exploit a track, so that it has a real deep, artistic value. I really like to make it evolve, to reshape it. Usually, that’s what live performance allows you to do, but artists don’t do it very much. Some bands don’t rework their songs at all.
Kik : It’s also down to the way live shows are approached. We play without a metronome, there are no synths, there’s nothing.
Max: We have amps.
Sylvain (bass): Yes, there are a lot of metal concerts without amps.
Kik: For example, I recently saw the band whose sweater you have [Marye was wearing a Rise of The Northstar sweater, editor’s note]. I’m not saying you shouldn’t do it, but they put themselves in a straitjacket that’s metronomic. It starts there, it ends there. It takes on a spectacular dimension, which is not at all what I want to do.
Pierre: Not in the sense of staging
Kik: In the sense of a show calibrated to the second, which is good for light shows. It’s not the ultimate choice, we have our reasons for doing it this way. We’re committed to the organic, the living. Things happen and so on. There’s an overall coherence here.
Max: It’s quite a strong choice to play without a metronome, without a tape. Even a lot of non-metal artists have them. When we played at Euroblast, we were surprised that all the artists didn’t have a soundboard, they just had the drums on the board, without amps. That’s not at all the way we’re used to making music and giving it to people.
Kik : Everyone’s free to do as they please, but when it comes to live shows, it’s all too calibrated. You see a show on tour, and if you go to another date, exactly the same thing will happen.
Max: It’s a bit more of an artisanal, rodeo way of making music. There’s a no-net, organic side to the way we play.
Victor: Then maybe it allows you to change your set throughout the tour.
Kik: There’s that, it also allows you to do tests, to do 4 points more, 4 points less. We all have improvisation slots in the songs. So on the album, it’s calibrated, but live, it’s open. So live, we’re obliged to look at ourselves.
Sylvain: One crazy thing is that we grew up with references from before the Internet, before the 2000s. The whole post-2000 Djent or prog scene, where we felt the change in the way we conceived of live music. We grew up with amps, and there’s an ultra-punk thing behind it. There’s a lot of substance.
Kik: That’s kind of what happened this afternoon, we were the only band with amps. [Vertex were recording the live sessions of French metal triumphs at Black Lab, along with Two Trains Left and Hurakan.]
Sylvain: We have our own references and our own way of approaching things. There’s something about the stuff we listen to. I’m thinking of ’80s thrash, that whole period. These are bands who learned together, with tempos for each part. When you listen to Slayer or Napalm Death, they’re really moving!
Pierre: Slipknot do that too!
Sylvain: Yeah, Slipknot did that on their first albums too.
Kik: I don’t know about you, but I think it’s really sanitizing. You lose what rock’n’roll is all about.
Pierre: Then there are choices that are made. I’m thinking of Messhugah, with a very strong aesthetic bias.
Sylvain: Yes, they’re pioneers, and it grooves. It’s trans music.
Kik: Yes, we’re not saying it’s not good, it’s just another approach to music, which is now being deployed everywhere. Everyone’s doing it now. When you see certain bands, you get walls of guitars, even though you’ve got two guitarists. But you’ve got six studio scratches thrown in on top, and they’re under-mixed, all right, but everything’s to the millimeter. For me, it’s weird when a singer takes off his mike and you hear his chorus coming from behind. It’s weird for me.
Max: In terms of the pleasure of playing like that, it gives me an outlet for my energy. It’s a real release in terms of pleasure. It may seem less professional for some people to play like that, but the audience gets all that energy.
Pierre: Yes, every time we play, we experience it. People are almost moved, they ride the music with you.
Kik: Well, if you crash in the middle of it, you just laugh. You look at your mate and laugh. Even if you make an oven, it’s living music! You drop a string, there’s no guitar sound anymore.
Max: In the process, it’s less serious to make a mistake. You don’t have to dramatize the fact of making a mistake. In the metal scene, there’s something about the expected performance that’s pretty high, and you put a lot of pressure on yourself. You have to know how to play it down and do it in a rock’n’roll way.
Pierre: In the djent scene, venues are full of snipers ready to pounce as soon as there’s a note out of place. First of all, you want to say, before sniping, come and work on your instrument, and then, you have to accept that it can happen to wallow.
Sylvain: People can sense that too, if you react in “it’s no big deal” mode.
Victor: That’s exactly what happened at the Plini concert at Motocultor. There was a real desire to be there, and they played prog without being too precise. They invited the audience to sit back and enjoy. It didn’t matter what was going on, they just played, without any headaches.
Marye: We’re talking about a whole range of musical genres, like what you’ve got on your album. You have the labels prog and deathcore. I find there’s a lot of very industrial rhythm behind it, but what stands out is the technicality, without ever being pompous, although it can quickly be. It’s been clear from the start of the interview that you’re real musicians who love music. Is there a desire to emphasize this technique?
Max: I think the main aim is to express something explosive, to give an emotion through this thing. It’s not technique for technique’s sake. It’s also a crazy side, letting go of the horses until the end. It’s like everything we say about making music without a metronome. We’re happy to make music like that.
Kik: Pierre has a bit of carte blanche on the drums, I think that’s how you feel.
Pierre: For me, it’s a bit of a lab too. When I write songs for Vertex, it’s stuff I’m experimenting with, it’s a real means of expression. I’m a bit of a nerd when it comes to my instrument, and I’m always trying to figure out what I can do with it. I’m always trying to figure out what I’m going to do with it. You’ve got to be able to dance a bit, you’ve got to have something going on, otherwise it bores me. Sometimes it’s too convoluted, there are moments, the pulse, the listeners won’t know there’s such and such a thing going on musically, it’s not a big deal.
Kik : What I feel in concert is that people are moving their heads and banging their hips. Even on hyper-technical stuff, people move around and get into it. In any case, it’s cool that you’ve heard that in our music.
Sylvain: There’s something mega lively about it. I didn’t record the album, but I knew some of the tracks. I felt like I’d died if I hadn’t recorded them, because when I heard them, I thought, “Oh fuck, it’s amazing! But it’s just that I know some of the tracks, I’ve played them, and if I listen to them, really as a listener, I say to myself “Well, not many bands have the audacity to present something acoustic” because here we’re really on an acoustic thing, in the sense that there are no samples. You feel the emotion thanks to the dynamics.
Pierre: It’s true that my playing is very dynamic. I’d like to mention Thibault Bernard from Convulsound studio, who mixed the album, and who respected that very well. He mixed it like a beefcake, he doesn’t mince his words, and he does it too well. It’s great because he really respected the notion of dynamics. It’s really important in music. Nowadays, we deliver blocks, masters… They’re behemoths. There’s something very acoustic about the drum sound, as Sylvain was saying. Thibaut, who mixed it, was a bit of a cable freak because of the number of groups he receives, where we send him midi tracks. Where the guys did it with software. It’s great that he respected that. You mentioned something about Indus.
Kik: That’s right, it was nice when you said that. You’re a good journalist [laughs].
Pierre: I love Indus, personally. On this album, we don’t use synths or keyboards, although we do use a little bit. We made a discreet little arrangement, but in indus you’ve got trig, samples, so it’s not something I’m rejecting. But that’s not what Vertex is about at all, the idea is: the piece. Sometimes I want to do a concert where I’ve got the amps, and the people are with us in the middle. We’d be playing in the middle of people, and I really like that.
Marye: You mentioned them at the very beginning, your label for this album is Le Cri Du Charbon. What was it like working with them?
Pierre: Cyril Balthazar has been a friend of mine for ten years or so. I worked with him with the group Bottle Next and that’s when we met. Le Cri Du Charbon is an independent label based in Saint-Etienne. It was special because we arrived, we had this record, we knocked on doors like Nuclear Blast… But these days, labels don’t really develop like that. It’s very complicated to come up with niche music like that. And Cyril, who wasn’t into metal at all, but who has a certain affection for this music, took the risk. I think it’s great that we’ve ended up with a record that, musically and in terms of the label’s approach, is completely out of step with what he’s doing today. It’s not a metal label at all, but it’s a real guy who produces the record. When we arrived, we already had the master of the finished record, but most labels, they sign but they don’t really produce a record. The artist finances everything, makes an advance and the label resells the merch, the fab to the artist. It’s a rather dubious approach. Not all labels do that, but I’ve had experience of labels like that. Cyril has real support, and a real approach to alternative music. I don’t know what to say, but I think that with Spotify, things are really shitty for artists. We’re in a very complicated economy that’s going to be disastrous for artists. Even big artists like Madonna are going to get screwed at some point. It’s like a snake biting its own tail. If it goes on like this, huge artists are going to get screwed. It can’t go on like this. I think there are plenty of people who could work with us. But we went to Cyril and le Cri Du Charbon, because he produces. For him, it’s also a game to say “Come on, I’m going to produce niche extreme metal”. He’s taking a risk, but thanks to him we’ve got distribution with Inouïe Distribution. I’m happy to do it with these people. It’s a bit on the bangs of the current system. For me, it makes sense, and that’s what’s going to keep the band going. If the band falls apart, it will never be because of the label or distribution, because I think we’ve done something human. We’re not looking for streams on Spotify, although most people do. I invite everyone to watch the “Played” series on Netflix, which is about Spotify. Even if I say go to one devil to know another a little better. You’ll see the scum that hold the music industry in their hands. The process is appalling. It’s revolting. So yes, we’re on Spotify because it’s the music world today, but we have to pay attention to what’s going on. Personally, I’d like to see things done differently.
Marye: We’re a little short of time, so we’ll end this interview with our usual question. On Sounding Shivers, we’re looking for all those bands that give us the shivers. Do you have any current French artists who give you those shivers?
Max: I listen to an artist from Lyon called Ugo Del Rosso, and he gives me the shivers every time I listen to him. His music is pop, mainly guitar and vocals. He also performs in a band, and released an album at the beginning of 2024, which is absolutely incredible music. He’s not super famous, but it’s absolutely brilliant.
Pierre: Chills may not be the right word, but I wanted to talk about Horshk, an indus band I really like. The indus scene in France isn’t very developed. I’m not a big fan of Carpenter Brut or Perturbator, but Horshk really speaks to me.
Marye: Many thanks for a great chat.
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