Au lieu de nous déplacer en force sur un concert comme nous le faisons régulièrement, nous avons simplement décidé de nous rendre dans deux lieux différents afin d’apprécier les notes de Leprous dans toute leur splendeur. Alors qu’une partie de l’équipe était à Anvers il y a quelques jours, direction le Théâtre de Béthune ce dimanche 23 novembre. Un moment hors du temps pour clôturer cette semaine avec un voyage vers la Scandinavie, également représentée par les Norvégiens de Gåte et les Finlandais de Royal Sorrow.
Article et photos par Zo’
English version below
La salle nous accueille chaleureusement dans un lieu qui nous emmène déjà ailleurs : le théâtre a toujours eu pour but de faire voyager les spectateurs en un autre lieu, un autre monde. Alors, quand les lumières se tamisent, nous nous préparons pour notre première excursion de la soirée avec Royal Sorrow. Le quatuor a sorti son tout premier single il y a un peu plus d’un an, suivi d’un premier album intitulé Innerdeeps en septembre dernier. Ils se sont imposés comme une nouvelle révélation dans le monde du métal progressif et alternatif. Ils proposent un mélange de riffs lourds et de breakdowns, qui nous inciteraient bien à bouger un peu plus si nous n’étions pas assis dans un théâtre, avec des passages où l’électro s’insère dans la mélodie prenant, parfois, clairement le dessus. Tout au long des six titres joués, Royal Sorrow nous fait entrer très facilement dans son univers, et les musiciens semblent prendre autant de plaisir sur scène que le public n’en prend à les découvrir, portés par une belle alchimie. Ils quittent ainsi la scène sous les applaudissements d’un public conquis, debout.
On bascule ensuite dans un univers plus mystique. Entre folk et électro, le son de Gåte est hypnotisant. La capacité vocale et la présence scénique de Gunnhild Sundli ne laissent place qu’à de l’admiration, tandis que John Stenersen l’accompagne d’abord dans l’ombre à la moraharpa, avant que les autres musiciens ne les rejoignent. Dès le début, la chanteuse nous confie espérer partager “un peu de magie du Nord”. Le rituel commence alors : doux, presque sacré, où parfois le côté plus expérimental et électro devient cathartique. Gåte ne se contente pas de ses racines folk : malgré la moraharpa et le violon, les guitares, le synthé et les effets électroniques ajoutent une dimension plus moderne. Personne ne tient en place : les musiciens évoluent comme dans une danse, et Gunnhild Sundli laisse parfois place à des passages instrumentaux où elle s’exprime plutôt via la danse contemporaine, tandis que Magnus Robot Børmark évoque un Puck nordique échappé d’un Songe d’une Nuit d’Été, et que Mats Paulsen fait tournoyer sa basse dans les moments les plus intenses. Le groupe norvégien couvre une large partie de sa discographie, avec des titres tirés de Iselija (2004) mais aussi de leurs travaux plus récents, et nous offre même la découverte de deux chansons de leur prochain album. La prestation de Gåte nous laisse sans voix : entre frissons et explosions d’énergie, la promesse d’un peu de magie du Nord est tenue, et le public, ravi, le ressent pleinement.
Nous aurions presque pu croire qu’après un tel moment la soirée touchait à sa fin, mais pas du tout, et il ne faudrait surtout pas manquer Leprous. La cohérence des premières parties devient d’autant plus évidente lorsque le groupe ouvre son set avec « Silently Walking Alone », un morceau imprégné de leur son prog caractéristique, teinté de touches expérimentales. Dès les premières notes, la puissance vocale d’Einar Solberg nous embarque dans la dernière épopée de la soirée. Des rythmes saccadés mais entraînants nous propulsent vers « Illuminate ». Aucun doute : le public compte de nombreux fans. Très vite, plus personne ne tient assis, et lorsque les premières notes de « Below » retentissent, quelques cris de joie fusent avant que les paroles ne soient reprises en chœur. Les derniers spectateurs encore assis rejoignent le mouvement.
Pour la suite, Einar Solberg présente ce qui est “l’une des seules covers” réalisées par le groupe, imposée par leur studio canadien, une chanson “beaucoup trop joyeuse” à leur goût. Leprous livre donc sa version de « Take On Me » : plus lente, plus lourde, plus eux. Sur scène, tout le monde bouge ; personne n’est figé, et les jeux de lumière subliment encore la dimension envoûtante du concert. L’énergie fluctue avec la setlist : parfois calme et posée, parfois intense, comme une tension qui se resserre peu à peu avant d’exploser. En parlant de la setlist, fait assez étonnant, Leprous modifie la sienne à chaque soirée nous permettant de nous étonner en entendant les notes de piano lançant “Distant Bells” se mêlant dans un calme parfaitement attentif à la voix maîtrisée de Einar Solberg. L’intensité monte au fur et à mesure du morceau, tandis que les instruments et les voix se greffent les unes aux autres. Ils poursuivent avec le rythme saccadé qui annonce “The Price” où les voix du public s’élèvent aussi pour se joindre aux chœurs qui ouvrent le morceau. Il s’agit de leur première venue à Béthune, une date immanquable pour beaucoup, et le public leur rend cet enthousiasme, ne manquant pas de se lever, d’applaudir, de siffler entre les morceaux.
Même en live, Einar Solberg ne délaisse pas son synthé : il s’y rend régulièrement pour jouer en duo avec Harrison White ou pour accompagner des interludes, notamment avant « Like A Sunken Ship ». Lorsque le chanteur annonce un retour à des titres plus anciens, il demande au public ce qu’il souhaite entendre. Parmi les réponses, « White » ressort… Il en entame une strophe seul au clavier, puis s’arrête avec un “that’s it” avant de lancer « Forced Entry ». Après un premier au revoir, « From The Flame » fait rugir la salle et pousse le public à demander le rappel sans la moindre hésitation. Le set se clôt finalement avec « Atonement » et l’outro instrumentale de « The Sky Is Red », laissant une salle comblée malgré un petit regret : nous aurions adoré entendre de vraies cordes sur scène pour certains morceaux, plutôt que des backing tracks.
Cette soirée au Théâtre de Béthune aura été un véritable voyage scandinave, porté par trois propositions plutôt différentes mais parfaitement complémentaires. Royal Sorrow a ouvert la voie avec une solide démonstration de metal progressif moderne, Gåte a ensorcelé la salle avec son folklore réinventé et sa magie nordique, et Leprous, fidèles à leur réputation, ont livré un set puissant, généreux et profondément habité. Une soirée où la musicalité, l’émotion et l’intensité n’ont jamais cessé de monter et dont on ressort avec l’impression d’avoir traversé trois mondes en une seule nuit.
Un grand merci à Victor pour l’accréditation, à A Gauche de la Lune pour l’organisation, et à l’équipe du théâtre de Béthune pour l’accueil.
Instead of traveling en masse to a concert as we usually do, we simply decided to visit two different venues to enjoy Leprous’ music in all its glory. While part of the team was in Antwerp a few days ago, we headed to the Théâtre de Béthune on Sunday, November 23rd. A timeless moment to end the week with a trip to Scandinavia, also represented by the Norwegians of Gåte and the Finns of Royal Sorrow.
Review and pictures by Zo’
The venue welcomes us warmly into a space that immediately transports us elsewhere: theater has always aimed to take audiences on a journey to another place, another world. So, when the lights dim, we prepare for our first excursion of the evening with Royal Sorrow. The quartet released their very first single just over a year ago, followed by their debut album Innerdeeps last September. They have established themselves as a new revelation in the world of progressive and alternative metal. They offer a mix of heavy riffs and breakdowns, which would encourage us to move a little more if we weren’t sitting in a theater, with passages where electro is woven into the melody, sometimes clearly taking over. Throughout the six tracks played, Royal Sorrow draws us easily into their world, and the musicians seem to take as much pleasure on stage as the audience does in discovering them, carried along by a beautiful alchemy. They leave the stage to the applause of a captivated audience, who give them a standing ovation.
We then move into a more mystical universe. Between folk and electro, Gåte‘s sound is mesmerizing. Gunnhild Sundli‘s vocal ability and stage presence leave room only for admiration, while John Stenersen accompanies her first in the shadows on the moraharpa, before the other musicians join them. From the outset, the singer tells us she hopes to share “a little bit of Northern magic.” The ritual then begins: gentle, almost sacred, where at times the more experimental and electro side becomes cathartic. Gåte is not content with its folk roots: despite the moraharpa and violin, guitars, synths, and electronic effects add a more modern dimension. No one stands still: the musicians move as if in a dance, and Gunnhild Sundli sometimes gives way to instrumental passages where she expresses herself through contemporary dance, while Magnus Robot Børmark evokes a Nordic Puck escaped from A Midsummer Night’s Dream, and Mats Paulsen spins his bass in the most intense moments.
The Norwegian band covers a large part of its discography, with tracks from Iselija (2004) as well as from their more recent work, and even treats us to two songs from their upcoming album. Gåte’s performance leaves us speechless: between thrills and bursts of energy, the promise of a little Northern magic is kept, and the delighted audience feels it fully.
We could almost have believed that after such a moment the evening was coming to an end, but not at all, and Leprous was not to be missed. The coherence of the opening acts became all the more evident when the band opened their set with “Silently Walking Alone,” a song imbued with their characteristic prog sound, tinged with experimental touches. From the very first notes, Einar Solberg’s powerful vocals take us on the final epic journey of the evening. Staccato but catchy rhythms propel us towards “Illuminate.” There’s no doubt about it: the audience includes many fans. Very quickly, no one is sitting down anymore, and when the first notes of “Below” ring out, a few cries of joy erupt before the lyrics are taken up in chorus. The last spectators still seated join in.
Next, Einar Solberg presents what is “one of the only covers” performed by the band, imposed by their Canadian studio, a song that is “much too cheerful” for their taste. Leprous delivers their version of “Take On Me”: slower, heavier, more them. On stage, everyone is moving; no one is standing still, and the lighting effects further enhance the spellbinding atmosphere of the concert. The energy fluctuates with the setlist: sometimes calm and composed, sometimes intense, like a tension that gradually builds before exploding. Speaking of the setlist, Leprous surprisingly changes theirs every night, allowing us to be amazed when we hear the piano notes launching “Distant Bells” mingling in a calm that is perfectly attentive to Einar Solberg‘s controlled voice. The intensity builds as the song progresses, while the instruments and voices intertwine. They continued with the staccato rhythm that heralded “The Price,” where the voices of the audience also rose to join the chorus that opened the song. This was their first time in Béthune, an unmissable date for many, and the audience returned their enthusiasm, standing up, applauding, and whistling between songs.
Even when performing live, Einar Solberg doesn’t abandon his synthesizer: he regularly returns to it to play a duet with Harrison White or to accompany interludes, notably before “Like A Sunken Ship.” When the singer announces a return to older songs, he asks the audience what they want to hear. Among the responses, “White” stands out… He starts a verse alone at the keyboard, then stops with a “that’s it” before launching into “Forced Entry.”
After a first goodbye, “From The Flame” roars through the room and prompts the audience to demand an encore without hesitation. The set finally closes with ‘Atonement’ and the instrumental outro of “The Sky Is Red,” leaving the audience satisfied despite one small regret: we would have loved to hear real strings on stage for certain songs, rather than backing tracks.
This evening at the Théâtre de Béthune was a true Scandinavian journey, carried by three rather different but perfectly complementary acts. Royal Sorrow opened the way with a solid demonstration of modern progressive metal, Gåte bewitched the audience with their reinvented folklore and Nordic magic, and Leprous, true to their reputation, delivered a powerful, generous, and deeply soulful set. It was an evening where the musicality, emotion, and intensity never ceased to rise, leaving us with the impression of having traveled through three worlds in a single night.
A lire aussi / Also to be read











































